4 raisons de positiver

S’il y a bien une raison pour laquelle j’ai quitté il y a quelques mois le Cambodge pour me réinstaller à Paris, c’est que je sentais qu’en France les choses commençaient à « bouger ». En effet, en dépit de tout l’amour que je porte au pays du sourire (ainsi qu’à la bière pas chère, la fête facile et le Pontoon), on ne pouvait plus dire que j’y trouvais un terrain favorable au déploiement de mes nouvelles aspirations citoyennes et écologiques.

Difficile en effet à Phnom Penh de fonder le Parti des Abstentionnistes et des Sans-voix, de manger bio, de discuter sérieusement démocratie directe, tirage au sort ou revenu de base ou de se soigner aux huiles essentielles.

Pas une seule fois je n’ai regretté mon choix depuis que j’ai pris cette décision car pas une seule fois me suis-je dis que mon intuition m’avait trompée, et si je chemin qui reste à faire est encore long, je côtoie chaque jour de nombreuses personnes qui y tracent déjà leur route à pas de géants.

Plus que jamais, je suis convaincue que le changement – qui devient chaque jour plus pressant et vital – ne passera pas par ceux qui ont le pouvoir et l’argent, car leurs intérêts sont à l’opposé de toute évolution, mais par ceux qui en sont dépourvus, ou croient l’être, autrement dit : nous tous.

Chacun de nos gestes quotidiens les plus élémentaires (manger, se laver, se déplacer, travailler, entretenir des relations avec les autres…) nous met face à des choix et selon la direction que nous prenons dans ces choix à faire, nous contribuons à tirer le monde dans un sens ou dans un autre. Ne négligeons donc aucun de ces petits pas car, mis bout à bout, ils sont ce qui construisent le monde de demain qui ne sera rien d’autre que celui que nous voulons et que nous nous serons donné les moyens de construire.

Je suis rentrée à Paris la veille des attentats du 13 novembre et, contrairement à ce qu’on pourrait penser, l’envie de me recarapater à la suite de cet événement ne m’a absolument pas traversé l’esprit, bien au contraire. Certes, j’ai été face à des réactions émotionnelles d’une grande violence, à une complaisance dans l’ignorance désespérante de la part de certaines personnes, à des propos malveillants qui m’ont beaucoup heurté. Mais ce que j’ai ressenti bien plus intensément, c’est une volonté ancrée au plus profond des cœurs blessés de faire corps ensemble et avec bienveillance face à l’horreur, de comprendre et de pardonner, d’éblouir la haine en faisant briller l’amour (je me place bien loin ici des discours politicards et médiatiques, je vous parle de ce que j’ai ressenti dans le creux de mon bide).

Bref, tout cela pour dire que je pense que de plus en plus de gens vivent, comme je le vis, une sorte d’éveil des consciences les poussant à déclarer la paix avec eux-mêmes, les autres, le monde et à se dire que ça suffit, qu’il est temps de changer, de se changer, de prendre ses responsabilités au lieu de rejeter la faute sur les autres, de réfléchir à leur propre puissance, à ce qu’eux pourraient faire chaque jour pour se rendre et rendre le monde un peu meilleur.

Concrètement, voilà 4 raisons de positiver tirées des observations que j’ai pu faire depuis mon retour en France

  1. Le succès d’Aromazone

Si vous ne connaissez pas encore Aromazone, il est grand temps pour vous de découvrir ce qui représente pour moi l’entreprise la plus coolos dont j’ai pu croiser le chemin ces dernières années. Créée en 2000 par un papa et ses deux filles passionnés d’aromathérapie et de cosmétique naturelle, cette PME familiale qui a démarré avec un portefeuille d’une quarantaine de produits en offre aujourd’hui plus de 1500 à des clients de plus en plus nombreux (et de plus en plus contents si l’on en croit le taux de satisfaction proche de 100%).

L’objectif d’Aromazone est de démocratiser l’accès à l’aromathérapie, cette science beauté/santé des huiles essentielles, et de proposer une vision naturelle et active de la cosmétique, impliquant les utilisateurs-trices dans la réalisation de produits sains et créatifs, inspirés des richesses offertes par Mère Nature.

Leur gamme de produits va des huiles essentielles (plus de 200) aux huiles végétales en passant par tout un tas d’ingrédients végétaux ou minéraux (certifiés bio) permettant de composer des cosmétiques maisons (hydrolats, cires, argiles, sels, colorants naturels, extraits de plantes, émulsifiants, conservateurs…) sans oublier le matériel, les contenants et les recettes, indispensable à leur réalisation et à leur conservation. Le tout à des prix dérisoires pour une telle qualité de produit !

A l’origine un site de vente en ligne, Aromazone a ouvert une superbe boutique (et une seul pour le moment hélas :() en plein cœur de Paris, à 2 pas de la librairie où je travaille. Autant vous dire que j’y suis régulièrement fourrée, parfois seule, souvent accompagnée, noyée dans la masse des dizaines et des dizaines de client…es (ahem) qui bondent à toute heure le magasin.

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Pourquoi c’est une putain de bonne nouvelle ?

Parce que cela participe à une révolution des rituels de beauté, accaparés depuis des décennies par des industriels bien plus soucieux de leurs profits que de la santé de leurs consommateurs-trices et de notre petite planète.

Parce qu’on voit bien le résultat des pratiques éthiques, financières, sanitaires et environnementales douteuses des multinationales de la cosmétique et des produits malsains qu’elles distribuent ; produits bourrés d’additifs, de sulfates, de parabens, d’allergènes et autres perturbateurs endocriniens… Bref de substances toxiques, dont le rôle dans les cancers, la baisse de la fertilité, les allergies, les irritations, les déséquilibres hormonaux n’est plus à prouver. Et que dire des emballages plastiques de ces poisons dont plus de 30% finiront dans les océans à empoisonner poissons, oiseaux et cétacées et à étouffer notre principale source d’oxygène.

Parce que fabriquer ses produits soi-même, c’est facile comme tout, super amusant, extrêmement économique et bien meilleur pour la planète, que cela booste la créativité, l’estime de soi, le partage et la satisfaction, que c’est une source d’apprentissage infinie et que cela élimine les doutes sur la nocivité des produits dont on s’enduit tous les jours.

Parce que se réapproprier son corps, sa peau, ses cheveux, sa santé ça n’a pas de prix et que c’est sûrement un des combats les plus important à mener dans les prochaines années.

Et enfin parce que l’argent que vous dépenserez à Aromazone n’ira pas enrichir des actionnaires cupides (et financer indirectement les campagnes électorales de politicards pas beaucoup plus innocents… sic) mais une équipe passionnée et une entreprise familiale et éthique qui respecte ses engagements et qui, elle, ne connait pas la crise (serait-ce lié ? ;)).

2. L’intérêt pour le polyamour, les amours libres et plurielles, le Lutinage

C’est assez fou comme le polyamour et l’amour libre se banalisent en France, ou du moins à Paris.

Même si la plupart des gens restent attachés à la notion de couple monogame (ce qui n’est nullement un problème tant que cela relève d’un choix réfléchi et éclairé et non d’un chantage à l’exclusivité et d’un besoin de contrôle du corps de son/sa partenaire), et malgré ce que j’ai pu dire sur notre manque de créativité en amour en déplorant le fait qu’on soit souvent un peu trop binaire (ensemble/pas ensemble, en couple/pas en couple), je constate quand-même que cela devient de plus en plus acceptable que se déclarer « poly », que parler de ses relations au pluriel provoque moins de haussements de sourcils et plus de curiosité, qu’avouer un « pas de côté » à ses amis expose plus souvent aux conseils bienveillants qu’au lynchage public, qu’un tas de personnes a priori réfractaires ne remettent pas en question le principe de libre disposition de soi… Bref, qu’on commence à comprendre que le modèle de relation amoureuse que l’on propose majoritairement est un carcan bien trop rigide face à la volatilité des désirs, aux aléas sentimentaux, aux besoins humains d’épanouissement et aux épreuves de la vie.

A ce propos je viens de terminer le Guide des Amours Plurielles de Françoise Simpère, une journaliste scientifique, mariée et lutine depuis 40 ans, qui a été la première à démocratiser le concept d’amours plurielles et à clamer haut et fort que oui, on peut aimer plusieurs hommes (et femmes). Je vous en recommande vivement la lecture, que vous soyez monogames aguerris, lutins en devenir ou polyamoureux accomplis. C’est plein de fraicheur et de réflexions passionnantes sur le couple, l’amour, la liberté, le désir, la confiance, les guerres d’ego, la jalousie, l’impermanence… Le seul hic c’est qu’il est épuisé et qu’on ne peut que le trouver d’occasion sur Internet. Pas facile d’apprendre à aimer au pluriel… 😉

Pourquoi c’est une putain de bonne nouvelle ?

Parce que la légitimation de la liberté d’aimer nous enseigne des choses fondamentales sur le plan des relations humaines : la conscience de notre libre-arbitre, la responsabilité face à nos engagements, la maitrise librement consentie de nos corps et de notre sexualité, la compersion (capacité à se réjouir du bonheur d’autrui), la bienveillance et la confiance plutôt que la jalousie, le sentiment d’appartenance mutuel et les divers interdits.

Parce qu’apprendre à se départir de nos vieux réflexes jaloux et possessifs ne peut que constituer une évolution personnelle bénéfique, que ce soit pour les individus qui s’engagent sur ce chemin que pour la société dans laquelle ils évoluent.

Parce que cela participe à l’ancrage dans l’esprit des gens que leur corps leur appartient et qu’ils n’ont pas à laisser quiconque le contrôler (même si cette personne les aime très fort et vice-versa). Et quand on voit les ravages que provoquent, dans certaines parties du monde, la négation du principe de libre disposition de soi (et la sexualité n’est pas un truc « à part » dans ce principe), on ne peut qu’y voir un progrès.

Parce que plus l’idée que les désirs sont multiples et volatiles et que chacun est en droit d’y répondre librement se répandra, moins il y aura de drames, de crimes passionnels, de réactions disproportionnées face au simple exercice du libre-arbitre humain, de mensonges, de cachotteries, d’humiliation. Et que petit à petit on mettra peut-être fin à l’énorme hypocrisie qui entoure les relations amoureuses et qui voudrait nous faire croire n’importe quoi (mythe de l’âme sœur, fusion éternelle, Prince Charmant et autres histoires à dormir debout) et à l’insatisfaction qui en découle et empoisonne tant d’individus et de couples.

Parce que cela dédramatise l’amour, que cela en fait un sentiment joyeux et léger, à vivre et à partager, et non plus un piège potentiellement dramatique et dangereux dans lequel il ne faudrait surtout pas « tomber ». Qu’on se le dise, l’amour est la seule chose qui pourra sauver ce monde. Donc arrêter de s’interdire d’aimer, c’est un putain de pas en avant vers un monde meilleur.

3. L’engouement pour l’alimentation végéta*ienne

« La viande ne me fait plus vraiment envie. Je n’en mange plus que rarement et c’est vrai qu’on se sent bien plus léger après un repas végét’ ».

Depuis que je suis rentrée en France, je ne compte plus le nombre de fois où j’ai entendu ce type de remarques de la part d’amis, de membres de ma famille, de collègues… Et de personnes dont je n’aurais jamais imaginé qu’elles franchiraient un jour ce pas !

Si on en est encore loin, « Demain, tous végétariens » sonne de moins en moins comme une utopie. Les végétariens sont considérés comme des personnes parfaitement normales et cohérentes et même les végans ne sont plus les weirdos qu’ils étaient encore il y a quelques années. D’ailleurs, les étiquettes se décollent peu à peu, signe que les murs des cases dans lesquelles on enfermait ces gens chelous il y a peu sont de plus en plus poreux. Au final, on commence un peu à s’en foutre de ce que les gens mangent et consomment et à plus s’intéresser au pourquoi et au comment de leurs choix, sans les cataloguer. Faisant fi de toute malveillance, fermeture d’esprit ou préjugés, beaucoup de gens commencent sérieusement à s’intéresser à ce mode de vie, et les informations qui circulent sur les réseaux sociaux ne peuvent que leur donner raison. On ne tourne plus en ridicule ces hyper-sensibles amoureux des poules et on commence plutôt à se demander en quoi le fait qu’un chat soit plus mignon qu’une vache lui donnerait un droit supérieur à la vie. On ferme son clapet devant les données montrant le poids écrasant de l’élevage sur l’environnement et on se dit que finalement, ça n’a pas l’air si mauvais ce burger aux lentilles. Et on constate également en pratique les bienfaits d’une alimentation végé sur la santé.

Vous n’allez quand-même pas me dire que ça ne vous met pas l’eau à la bouche?! (pour la recette cliquez sur la photo)

Pourquoi c’est une putain de bonne nouvelle ?

Parce qu’à plein d’égards, plus les gens se mettront à manger veg’, mieux ça sera ! En effet, un régime végéta*ien :

  • Est, s‘il est bien mené, extrêmement bénéfique sur le plan de la santé par sa richesse nutritionnelle et sa pauvreté en graisses saturées et en cholestérol ;
  • N’implique pas de sacrifier la vie ou le bien-être de millions de petits nanimaux qui ne demandent qu’à vivre leur vie perperlito et supprime par conséquent un lot de souffrance inimaginable dont le monde se passerait bien ;
  • Pèse bien moins lourd sur les ressources en eau, sur les terres, sur la pollution de l’air qu’un régime riche en produits animaux, et dans cette période où ces ressources se font rares, c’est un calcul à prendre en compte ;
  • Améliore la sécurité alimentaire mondiale en ne gaspillant pas de la nourriture qu’on pourrait donner aux humains à nourrir des animaux destinés à être mangés (pour rappel – grosso modo parce qu’évidemment et malheureusement tout n’est pas si simple – pour faire 100 grammes de bœuf qui vont nourrir 1 homme, il faut 1 kilo de soja qui pourrait nourrir 10 hommes).

Par ailleurs, le fait que de plus en plus de gens s’y mettent aura un autre effet bénéfique je pense : celui d’une circulation facilitée de l’information et des connaissances. Qu’il existe des risques à passer brutalement d’un régime omnivore à un régime végétal est incontestable. Nous avons tout à réapprendre. Mais plus il y aura de végés qui s’y intéresseront et parlerons de leur expérience (leur expérience de vrais gens, pas celle, forcément galvaudée, de lobbies laitiers ou viandards aux intérêts financiers colossaux), moins il y aura de risques de faire n’importe quoi. Je suis assez persuadée que les végans qui ont déconné étaient des gens isolés et mal informés parce que, justement, l’information n’existait pas. Que les flippettes des potentiels ravages des régimes végéta*iens soient donc rassurés ! (oui Marion, c’est bien à toi que je pense 😉 )

4. L’élévation d’une conscience citoyenne

Comme je l’ai expliqué dans cet article, je suis profondément persuadée qu’aucun changement réel ne pourra advenir si nous, le peuple, ne reprenons pas en main les clés du pouvoir politique que nous avons inconsciemment abandonné à des représentants qui ne représentent qu’eux-mêmes. Et ça, je pense que de plus en plus de gens commencent enfin à le comprendre.

Avant mon retour du Cambodge, il y avait déjà Etienne Chouard, ses ateliers constituant visant à apprendre au peuple à rédiger sa propre constitution et ses Gentils Virus, contaminant le reste de la population avec l’idée simple que « Ce n’est pas aux hommes au pouvoir d’écrire les règles du pouvoir » qui commençaient à acquérir une certaine notoriété.

Depuis mon retour en France, il y a eu le succès de films comme Demain ! ou Merci Patron qui traduisent bien le ras-le-bol général mais aussi et surtout la prise de conscience de notre propre puissance et de notre capacité à renverser les choses en notre faveur avec un peu d’enthousiasme, de créativité et d’énergie.

Et puis dernièrement il y a le mouvement Nuit Debout qui rassemble chaque jour des milliers de personnes sur la place de la République à Paris, et sur d’autres places partout en France. J’y suis allée dimanche (j’y retourne ce soir, qui m’aime me suive) et j’y ai trouvé un formidable élan démocratique et pacifique qui faut chaud au cœur. Pour le moment, les occupants ne sont pas là pour revendiquer quoi que ce soit, il n’y a pas de programme, pas de plan, pas de lignes toutes tracées mais les idées fusent de toute part et sont discutées et débattues. Tout le monde peut prendre la parole, on vote, on s’exprime dans le calme et la bonne humeur. C’est à la fois sérieux et bon –enfant, et ça grossit jour après jour…

Ça c’était mardi 05 avril, ou pour reprendre la terminologie du mouvement, mardi 37 mars 🙂

Pourquoi c’est une putain de bonne nouvelle

Parce que cela nous montre, en pratique, ce que pourrait être la démocratie directe, la seule vraie démocratie, en fait. Qu’elle n’est pas une chimère, une douce utopie caressée par une bande de bisounours idéaliste mais un système hautement souhaitable, ou tout le monde aurait sa place et dans lequel les intérêts d’une poignée d’individus ne pourrait prendre le pas sur l’intérêt de tous. Et qu’elle n’est pas seulement souhaitable mais également possible, envisageable, probable. Dimanche soir, on était 2000 (c’est-à-dire deux fois plus nombreux que ce qu’il faudrait pour créer une assemblée constituante qui soit la plus représentative possible du peuple français selon la loi mathématique des grands nombres) et on avait pas de problèmes pour se mettre d’accord. Alors bien sûr, le mouvement rassemble une foule assez homogène de personnes qui partagent une certaine vision du monde et de la vie, mais quand bien même. De toutes façons je reste persuadée que l’immense majorité des humains aspire à peu près à la même chose : une vie simple dans un environnement sain, des amis, de l’amour, des activités épanouissantes, le sentiment d’être utile à quelque chose… et que sur le comment y arriver, il ne devrait pas être si compliqué de s’entendre.

Donc avis aux cynico-sceptiques qui guettent la fin du mouvement et lui prévoient déjà le même destin qu’à des mouvements comme Occupy Wall Street ou Los Indignados qui, soit disant, n’auraient  rien changé (« Ben suffit de voir le scandale des Panama Papers pour voir que rien n’a changé et ne changera jamais » « Euh… PROUT ! »). Ce n’est pas grave si nous ne voyons pas dans les jours, les semaines, les mois prochains les résultats du travail qui est actuellement mené. Nous ne sommes pas là pour tout renverser en quelques jours car nous avons bien conscience que rien ne marche comme cela, que les changements mettent du temps à arriver, à se faire une place dans les esprits et dans la conscience collective, que les graines que nous plantons vont prendre un temps infini à germer puis à pousser.

Nous ferons notre part et nous serons patients.

And the rest is history…

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Et vous, quelles sont vos raisons pour positiver? 🙂